Résumé
La chimie des otolithes permet de retracer avec succès le passé environnemental des poissons téléostéens qui dépendent des estuaires et, en particulier, leurs déplacements entre les estuaires et les milieux côtiers. La méthode est cependant plus rarement utilisée chez les espèces qui sont exposées exclusivement aux eaux de l'océan, car les gradients des propriétés physiques et chimiques y sont moins marqués. Afin de vérifier si les signatures des éléments dans les otolithes enregistrent des renseignements de nature spatiale chez une espèce océanique, nous avons prélevé des otolithes de la légine australe (Dissostichus eleginoides) et nous avons utilisé un spectromètre de masse à plasma inductif (ICP-MS) couplé à un système d'ablation laser pour cibler les couches externes des otolithes qui correspondent à la période qui précède immédiatement la capture. Une analyse de variance multidimensionnelle et une analyse discriminante multidimensionnelle démontrent que les signatures sur les couches externes permettent de discriminer les otolithes d'après la région géographique avec un succès presque complet; seuls 5 % des poissons capturés au large de l'Amérique du Sud et dans l'Antarctique sont mal classifiés dans des zones d'échantillonnage de l'autre région. De plus, les signatures des couches externes indiquent de fortes différences entre les zones d'échantillonnage de chacune des régions : les poissons récoltés au large de l'Amérique du Sud sont placés à 7984 % dans des zones d'échantillonnage de la région et ceux de l'Antarctique à 5067 % dans des zones d'échantillonnage de cette région. Ces résultats se comparent avantageusement aux taux de classification obtenus chez les poissons associés aux estuaires, ce qui démontre que les signatures des éléments dans les otolithes permettent de reconnaître l'origine géographique des poissons océaniques aussi bien que celle des poissons estuariens.[Traduit par la Rédaction]